Comment se prénomment vos enfants et quel âge ont- ils.
Julien, 16 ans et Mathilde, 10 ans.
Quelle est la personnalité de chacun. Sont-ils très différe nts ou se complètent- ils. S’apportent- ils l’un l’autre.
Julien et Mathilde sont très différents. Ils se complètent beaucoup et s’apportent beaucoup l’un l’autre.
Julien est un enfant passionné. Il est très sensible. Il ressent beaucoup les choses. Il est réservé dans le sens « il n’ose pas » mais cela s’atténue avec l’âge. Plus petit il était plus à l’aise dans un monde « de plus grand ». Il aime la justice et tout ce qui est juste… Il fait très attention à lui, à son apparence. Julien assume très bien qui il est. C’est un enfant sportif, éprît de liberté, qui a la tête dans les nuages. Il aime le ciel, il aime voler. Sa passion l’aviation.
Mathilde est pertinente, pétillante, sûre d’elle, terre à terre. Rien ne lui pose de problème. Elle ne se pose pas de questions. La vie est belle et elle la croque à pleines dents. Mathilde n’a honte de rien et est très à l’aise. Elle fait beaucoup le clown. Elle se met en scène et fait rire toute la famille. Son frère nous dit souvent : « je ne sais pas comment elle fait. Jamais je n’oserai. » . Il y a beaucoup de fierté dans ces paroles. Quand elle fait le clown, il se cache derrière un coussin. Elle le fait beaucoup rire. Ses passions le ski et le chant.
Ils se complètent dans la continuité sportive. Julien a fait du saut à ski en compétition avant de se lancer dans l’aviation. Mathilde fait du ski en compétition.
Ils s’apportent l’un l’autre car nous avons toujours élevé nos enfants de façon « indépendante ». Ils sont frère et sœur mais chacun a sa propre vie, ses propres activités, ses propres passions. C’est de là qu’ils s’apportent. Julien est devenu le jour de ses 15 ans le plus jeune pilote de France. Il est parti également vivre un an dans une famille d’accueil aux USA l’année dernière à 15 ans.Mathilde a suivi ses parcours, elle les a aussi vécus en quelque sorte. Elle les a partagés. Elle s’enrichie des expériences de son frère. Pour certaines, cela lui a donné des idées, cela a piqué sa curiosité pour plus tard. Et Mathilde apporte beaucoup à son frère d’un point de vue personnalité. Elle ose ce qu’il n’ose pas. Il peut facilement l’envoyer « au charbon » pour une demande qu’il n’ose pas alors qu’elle a 6 ans de moins que lui … ils sont marrants.
Avez-vous voulu suivre pour vos enfants, l’éducation que votre maman vous a donnée ou fait l’inverse.
En grande partie mais pas tout. J’ai choisi de ne pas reproduire des « erreurs inconscientes » que j’avais pu constater dans mon éducation. J’ai choisi de reproduire seulement ce qui avait fonctionné.
Je pense qu’être parents n’est pas une science innée. Cela s’apprend et cela vient avec les années, avec l’expérience mais aussi on apprend de ses erreurs.
De quoi êtes- vous le plus fier à ce chemin de leur vie d’avoir aidé à contribuer, de leur avoir insufflé.
La politesse. Le Courage. Le respect. Le gout du travail et de l’effort. La persévérance. Le goût de la réussite. Les liens familiaux. L’amour et la tendresse qu’il y a entre nous.
Comment leur inculquez- vous que « tout est possible » dans la vie.
Nos devises familiales :
« La plus grande gloire n’est pas de ne jamais tomber, mais de se relever à chaque chute. » Confucius
« Je ne perds jamais. Soit je gagne. Soit j’apprends. » Nelson Mandela
Je leur ai toujours dit que peu importe ce qu’ils faisaient dans leur vie du moment qu’ils avaient choisi , qu’ils étaient heureux et qu’ils faisaient les choses avec passion. Il n’y a pas chez nous de transmission familiale comme « tu seras médecin, avocat, comme ton père ! ». Cela enlève un certain poids aux enfants. Ils sont libres.
Je veux qu’ils soient libres de leurs choix. Mais ils doivent gagner cette liberté. Elle n’a pas de prix. Pour cela il y a des sacrifices. Ex : bien travailler à l’école !
Tout est possible s’ils se donnent les moyens pour atteindre cette idéologie. Rien n’arrive sans rien. La valeur travail a beaucoup d’importance pour nous. Le gout de l’effort. On ne lâche rien.
On ne parle jamais d’échec. Si on n’arrive pas à quelque chose : on apprend. C’est de l’expérience que l’on accumule. Et on travaille toujours avec eux sur un plan B, voire C.
Julien a des ambitions professionnelles précises. C’est très bien. Mais au cas où, la sélection étant là et les places rares, on lui a déjà demandé de penser à son plan B et même C. Car on ne sait jamais. Si le plan A ne fonctionne pas et bien ce n’est pas grave, on passe au suivant et on reste dans le positif.
Nous essayons toujours de positiver. Pour cela nous avons 4 traditions dans notre famille.
La première, quand quelque chose ne va pas, que l’on n’a pas le moral, que l’on n’est pas très bien : On regarde vers le ciel. Automatiquement le sourire vient sur votre visage vous ne pouvez pas y échapper et cela change votre humeur. Alors quand je vois mes enfants maussades, je leur demande de regarder le ciel… et ils éclatent de rire !
La deuxième, c’est la technique du « chic chic chic ». Il y a toujours un côté positif à chaque situation négative. Il faut juste la trouver … mais elle existe. Si quelque chose est négatif dans la vie de mes enfants, je leur demande de trouver ce qui est positif dans ce cas précis. En réfléchissant ils se rendent compte que souvent ils ont acquis quelque chose de cette expérience... même si elle était négative. Chic chic chic
La troisième ce sont les poissons. J’ai installé dans la chambre de mes enfants des faux aquariums. Puis régulièrement lorsqu’ils ont fait quelque chose de bien, lorsqu’ils ont réussi quelque chose, je prends un bout de papier, je dessine d’un côté un poisson et de l’autre je leur mets un mot : Ex : « aujourd’hui à ton devoir de math tu as eu A. Ton travail a été récompensé. Tu peux être fier de toi comme nous le sommes. On t’aime. »« Tu es important pour moi » « Vas-y tu peux le faire » « Bien-sûr que tu as les ressources en toi pour réussir » « Il est important de se tromper pour apprendre »…. Avec toujours beaucoup de cœurs dessinés ! Et je dépose le message sur leur bureau ou leur oreiller. Ils le mettent dans leur aquarium. Quand le moral n’est pas au beau fixe, je leur demande d’aller piocher un, deux, trois poissons dans leur aquarium et de les lire. Cela remonte vite le moral…. Et ils m’ont même fait un aquarium pour moi !
Enfin, nous « marquons »
Par quel biais leur montrez-vous que l’Art (sous toutes ses formes) est important pour mieux ressentir la Beauté du Monde.
Nous voyageons. Nous voyageons beaucoup.
Ma maman est diplomate. Toujours en activité. J’ai grandi à l’étranger. J’y ai appris la vie, le partage, l’humanité, la différence… et quelle chance !
Je transmets cela à mes enfants. Grace à ma maman en partie car nous allons la voir dans tous les coins du monde.
L’ouverture d’esprit est à mes yeux très importante.
Cela permet de réaliser beaucoup de choses. Souvent cela les rappelle à l’ordre sur la chance qu’ils ont.
Cela permet aussi de faire ses choix de vie.
La lecture a t- elle une place importante chez vous et chez vos enfants.
La lecture est une histoire de femmes chez nous ! Ma fille et moi, oui.
Mon mari et mon fils … très peu. Ils sont plus dans le sport, le bricolage, l’aviation, les maths et la physique !
Quand ils étaient petits, vous avez allié le fait d’être une femme, une maman et une carriériste. Etait-ce difficile.
Très difficile. On culpabilise beaucoup …
Alors on trouve sa place avec le temps dans ces 3 rôles.
Mais avec le temps et l’âge, on se rend compte qu’en fait nous sommes une grande chance pour nos enfants. Les enfants copient tellement de choses inconsciemment. L’image qu’on leur donne.
Nous sommes des exemples pour eux.
Nous sommes des modèles pour nos enfants …
Je suis fière d’être cette image à leurs yeux. L’image du courage et du « c’est possible », mais aussi l’image d’une maman qui parfois a besoin de repos. Il faut rester « humain ».
Par contre, seule, non, ce n’est pas possible. Il faut être réaliste. Si j’ai réussi à mener ces 3 vies c’est grâce à 2 soutiens précieux et indispensables : ma nounou. 14 ans d’histoire commune. Elle a eu nos 2 enfants. Sans elle, n’ayant pas de famille dans la région, cela n’aurait pas été possible. Et puis bien entendu mon mari sans qui tout cela n’aurait pas été possible non plus. C’est une réussite commune. On est tous un maillon de la chaîne.
C’est une histoire de famille tout ça !
Nous parlons beaucoup en ce moment (une campagne est en cours) des mots négatifs entendus dans l’enfance et qui font diminuer l’estime de soi. Qu’en pensez-vous.
C’est terrible et il faut les bannir.
Mais il faut dissocier le parent destructeur qui va utiliser ces mots régulièrement pour rabaisser, pour détruire, du parent surmené qui malheureusement parce que l’on est tous des êtres humains faillibles, lâche parfois un mot qu’il n’aurait pas dû lâcher. Cela arrive à tous les parents. Il faut juste savoir s’en rendre compte et aller s’excuser auprès de son enfant.
J’ai beaucoup appris personnellement sur ce sujet car en voulant faire bien, ex en voulant motiver son enfant, et bien parfois on prend le chemin de la comparaison. C’est très fragile comme terrain et tellement facile de glisser.
Au-delà du milieu familial, les mots négatifs sont malheureusement trop
J’ai toujours été parents d’élèves pour les classes de mes enfants. J’ai, toutes les années été effarée lors des conseils de classe. Les professeurs critiquent les jeunes, et ne pointent que ce qui ne va pas. Mais dans chaque enfant il y a quelque chose de bien. Pourquoi ne pas le pointer et s’appuyer dessus pour développer l’estime d’eux-mêmes au lieu de les enfoncer ? J’ai osé un jour prendre la parole lors d’un conseil pour demander : « et qu’est ce qu’il y a de bien chez ce jeune ? … » Il y a eu un gros blanc dans la salle !Heureusement il y a des profs qui sortent du lot et qui essayent … mais ils sont, à mon goût, trop rares !
Aux USA jusqu’à la graduation = BAC, il n’y a pas de notes. Il y a des % de réussites , pas d’échec, de réussite ! Il y a une différence psychologique indéniable entre tu as réussi à 50%, tu as échoué à 50%, ou tu as eu 10/20. La finalité est pourtant la même. « Le résultat scolaire » est pourtant le même. Mais pour l’enfant et pour son estime de lui, c’est totalement différent.
Etes-vous satisfaite et fière de ce que vous avez donné jusqu’ici à vos enfants ou changeriez-vous certains moments.
On peut toujours être perfectible mais oui je suis très fière de ce que j’ai donné à mes enfants jusqu’à ce jour.
Cette fierté vient souvent des autres car en tant que parents nous ne nous en rendons pas compte. On a l’impression de ne jamais faire assez pour ses enfants.
Ce sont les phrases comme : « vos enfants sont très polis », « qu’est ce qu’ils sont bien élevés », « vos enfants sont supers sympas » … là je me dis que ma persévérance éducative (ne rien lâcher) paye. Et j’en suis fière.
Si je peux leur faire découvrir le monde entier, si je peux accéder à leur demande d’études, de passion, d’activités extra scolaires, de compétition, c’est aussi parce que j’ai réussi professionnellement et parce qu’il y a eu quelques sacrifices. On n’a rien sans rien.
Alors lorsque je vois mon fils tellement heureux aux commandes d’un avion, lorsque je vois ma fille au départ d’une course de ski et revenir très fière avec ses coupes, lorsque je partage avec eux la découverte des endroits les plus beaux au monde, je me dis que peu importe les sacrifices, ils en valaient vraiment la peine.
Si je n’avais pas été carriériste probablement que je n’aurai pas pu leur offrir tout cela. J’aime mon travail mais c’est aussi pour eux tout ça…
Alors non je ne changerai rien.
Vous pouvez retrouver Sophie, Mathilde et Julien en cliquant ici et avoir des nouvelles fraîches de novembre 2020, 3 ans après ce magnifique portrait.